Cette étude a été présentée à l'occasion du Foro del vino de Logrono.
L’introduction de micro-organismes (Trichoderma et Mycorhizes) dans les plants de vigne
Introduction
Depuis longtemps, les maladies du bois de la vigne sont signalées comme un problème majeur pour le vignoble. Les causes et mécanismes de ces maladies sont encore inconnus ou tout du moins pas réellement encore bien compris. Différentes enquêtes dans le monde entier ont permis d'identifier plusieurs champignons, pathogènes ou non, associés à des tissus de vigne présentant des symptômes de maladies.
Les maladies sont appelées, selon les pays, l'esca, l’eutypa dieback, la maladie de Petri, black dead arm, black foot, le chancre de la vigne, et sont communément attribuées à: Eutypa lata, Phaeoacremonium spp, Phaeomoniella chlamydospora, Botryosphaeria spp, Fomitiporia spp., Phomopsis spp. Cylindrocarpon spp, ...
Depuis 2001 et l'interdiction de l'arsenic de sodium, il n'existe plus de moyens pour éliminer, réduire ou contenir ces maladies, qui voient chaque année le nombre de ceps touchés, croître entre 1 et 5% en fonction de la région (données françaises). Dans certains vignobles, les vignes malades représentent 20% du total, avec une mortalité annuelle d'environ 5% (données italiennes).
Le Trichoderma est connu depuis longtemps comme un champignon antagoniste fort, utilisé dans certaines cultures comme biocontrôle pour endiguer les micro-organismes pathogènes.
Une souche particulière de Trichoderma atroviridae (I-1237) a été analysée dans le laboratoire des pépinières Mercier pour vérifier son efficacité et ses caractéristiques sur les plants de vigne contre plusieurs champignons.
Matériels et méthodes
Huit cultivars de vigne greffés sur différents porte-greffes (figure 2) ont été étudiés depuis 2005. Tous les essais ont été réalisés sous serre. En 2005, les végétaux ont été trempés dans une solution à base de Trichodermaatroviridae I-1237 pour induire une inoculation. Les plantes ont ensuite été remises en pots et placées dans des serres au printemps. L'analyse a été réalisée par le laboratoire de Dijon de l'INRA, les premières mesures ont été effectuées 3 mois après la croissance, et les suivantes après 8 et 15 mois.
Pour suivre l'évolution du Trichoderma I-1237 dans la plante, 5 à 10 échantillons de bois
ont été prélevés dans chaque zone (figure 1). L'écorce a été enlevée et les rondelles de bois ont été désinfectées et placées avec de l'agar dans une boite de Petri. Après une incubation de 3 jours à 25°C, le nombre de rondelles de bois colonisé par Trichoderma I-1237 a été noté.
Pour évaluer la résistance aux pathogènes, les jeunes plants traités avec la souche I 1237 ont ensuite été inoculés avec l'un des 4 pathogènes suivants: Botryosphaeria parva, Botryosphaeria obtusa, Phaeoacremonium aleophilum et Phaeomoniella chlamydospora. Chaque champignon pathogène, sous forme de mycélium, a été inoculé dans le porte-greffe à travers un trou de 3 cm en dessous du greffon. Les plaies d'inoculation sont alors protégées par un film spécial (photo 1) et les plantes sont alors mises en pots et placées sous serre (photo 2).
Résultats
Le Trichoderma I-1237 se trouve toujours dans des échantillons de porte-greffe (figure 2). Colonisant entre 70% à 100% à la base des plants, de 35% à 95% au milieu, et 45% à 90% juste sous le point de greffe. Nous notons que nous avons également trouvé différentes souches de Trichoderma dans les plants de contrôle. Cela démontre que les Trichoderma sp. sont naturellement présents dans les sols et les vignes. Toutefois, le Trichoderma «sauvage» ne semble pas se développer facilement dans le bois. I-1237 qui présente une croissance encore plus grande.
En présence du T. atroviridae I-1237, la fréquence de la colonisation de la vigne par les 4 champignons pathogènes étudiés est plus faible (figure 4). La réduction varie en fonction de la
zone analysée. La souche I-1237 est plus efficace pour réduire B. obtusa, B. parva, et la progression de Ph. aleophilum. dans le bois. Nous avons pu observer des réductions plus élevées de 80 à 90% par rapport aux installations de contrôle non protégées.
D'autres travaux nous ont montré une forte résistance du T. atroviridae I-1237 contre les 8 principaux types de fongicides utilisés essentiellement dans les pépinières et les vignobles (données non présentées ici).
Figure 4: Fréquence (A) et l'intensité (B) de la progression, si différents champignons pathogènes (B. obtusa, B. parva, Ph. Aleophilum, chlamydospora Ph) en bois traité (vert) ou non (blanc) par Trichoderma I-1237 . Les résultats sont présentés pour chaque domaine du bois.
Conclusion
Avec ces résultats encourageants, nous avons amélioré les techniques d'inoculation en y ajoutant une formulation particulière de mycorhize (Glomus mossae) dans le substrat de croissance.
Une efficacité de 60 à 90% de la mycorhization a été mesurée. Les plantes avec le trichoderma et les mycorhizes sont commercialisées par les pépinières Mercier depuis 2009 (Force9 ®), des études in vivo sont en cours pour confirmer ces résultats au vignoble.
Figure 2: Fréquence de la colonisation de la vigne par Trichoderma I-1237 atroviridaestrain ou Trichoderma sp. («Large»), 3 mois après
Figure 1: Schéma montrant les zones échantillons prélevés pour analyse
Corinne Romand 1,Christelle Cordier 2, Emilie Carrouché 1, Katerina Labonova 1, Michelle Hurtaud 1, Olivier Zekri 1
1 -Laboratoire Mercier Novatech-Le Champs des Noëls, 85770, Le-Gué-De-Velluire, France
2-INRA -UMR M.S.E 17, rue Sully, 21000, Dijon, France